21 février : Hadzabe encore

Aujourd'hui deux Hadzabe à enregistrer : Matteo et Mama Cristina.

Je commence à m’habituer au rythme et à la vie africaine. L’électricité saute régulièrement et il faut qu’on attende que ça revienne. Pendant ce temps, on discute de musique, de cultures, des enfants… Les enfants du village ont franchi un cap. Deux petits sont venus sur mes genoux et m’ont touché les cheveux. Ils sont fascinés par les cheveux lisses et blancs. Ici tout le monde est crépu ou alors le crâne rasé. Même les personnes âgées gardent les cheveux foncés. Ceci dit je n’ai pas vu beaucoup de vieux. Un petit a dit « c’est comme dans les films » en touchant mes bras blancs et mes cheveux lisses.

Lors d’une pause, j’ai montré la photo de mon profil Facebook dans laquelle on voit Maurin, Lily, Nathan, Marion et moi sur la partie droite. On voit aussi ma photo au milieu. Et les Hadza ne croyaient pas que c’était moi car je ne pouvais pas être deux fois sur la même photo… je leur ai montré mon jardin et ils ont été fascinés par les tomates qui dans cette partie de l’Afrique, sont petites et rampantes. Ils se sont moqués de mon unique rangée de maïs car ici, on en voit sur des km2. Ils ont aussi flashé sur les patates et les fraises. Chose étonnante, la région a une grosse production d’oignons rouges.  En parlant des photos, Seguenzi a conclu qu’on avait la chance de pouvoir garder tout ça dans des machines pour garder en mémoire et partager avec d’autre et c’est vrai. 

J’ai finalement réussi à me connecter sur le Webmail de l’AMU et j’ai retrouvé finalement les photos que m’avait envoyées Doris Barboni, la collègue du Cerege qui a bossé chez les Hadza en 2011. Et là oh surprise, je tombe sur Bogoshi, notre premier locuteur. Les photos ont dix ans mais Seguenzi reconnait Bogoshi, son oncle Sikwazi et d’autres enfants qui sont devenus adultes. Fascinant. A ce propos, Bogoshi était identifié en 2011 sous le nom de Gedegej. Il parait que c'est fréquent chez les Hadzabe.

 En fouillant sur le Net, je tombe sur cette affiche de film et je suis sûr que c'est lui (regardez son collier et son T-shirt) : une vraie vedette en fait !

Aujourd'hui, c'était jour de lessive. Il était temps car mon pantalon de treillis commençait à tenir debout tout seul. Je commençais aussi à recycler chaussettes et caleçons. Bref, je ne me suis pas fait prié quand on m'a dit que la gardienne du guest house nous laverait le linge contre une petite somme. Tout à la main évidemment. Puis étendage en plein air bien sûr.

Ce soir, pour le repas nous avons pu manger du manioc fris. C’est très bon. Ça ressemble à de la patate frite. Au milieu du repas, un jeune est arrivé, bien habillé, anglophone et s’est installé au milieu des deux hadza. Au début, j’ai cru que c’était un curieux comme souvent, mais il était vraiment curieux. On est finalement sortis du bouiboui où on mangeait. On a appris que c’était un agent du gouvernement. Un peu flippant tout ça. Finalement, chez nous, on n’est pas si mal.

Avec Didier, on est super contents des données qu’on a enregistrées. « De la super qualité qui va révolutionner la phonétique » dixit Didier. C’est possible. En tout cas, on a collecté un corpus pour trois thèses et plein de projets. On va y réfléchir. Sur EVA, on a été très vite au point. Sur les labiofilms, on avait peu d’expériences et on a clairement raté les premiers. Mais on a bien progressé. Pour la palato, j’ai bien peur qu’on doive tout jeter : les photos sont sombres, floues, désaxés, incomplètes. Il faudra clairement remettre tout ça au point et je pense qu’un mini banc portable sera nécessaire pour recueillir des données correctes. En tous cas, cette expérience de terrain m’a clairement reboosté. Je suis crevé́ mais super content.