24 février : safari au Parc Manyara

24 février 2020

J'ai laissé cette page blanche pendant plusieurs années car cette visite du Parc Manyara en 2020 a été à la fois incroyable mais m'a aussi mis mal à l'aise. Je l'écris en 2022 après mon retour de mission chez les Massai. Il m'est difficile de témoigner deux ans après mais j'ai été à la fois envouté par la flore et la faune sauvage, mais j'ai mal vécu tout le business derrière ça, toute la mise en scène, toute l'industrie touristique comme les embouteillages de 4x4 pour prendre en photo la queue d'un léopard perché sur un arbre à 150 m. La première partie du safari me laissera vraiment un gout amer. Par exemple, la ballade à pieds avec le "ranger" armé jusqu'aux dents pour nous protéger restera une mascarade, le ranger nous faisant croire à de mutiples reprises que nous allions tomber nez à nez avec des hyènes. Je pense qu'il n'y avait pas plus de risque qu'en se promenant autour de l'étang de Berre en faisant croire qu'on pourra croiser des loups alpins. Globalement, on ne voit pas grand chose à part des paysages magnifiques et des troupeaux au loin. C'est uniquement quand notre 4x4 quittera les sentiers battus que nous tomberons nez à nez avec des éléphants, des girafes, des babouins et autres animaux. Merci à nos amis tanzaniens d'avoir permis cela. Je garde une position mitigée sur ce tourisme du safari qui permet aux riches occidentaux de fantasmer et rêver de nature sauvage que nous avons complètement éradiquée chez nous tout en permettant à une partie des africains de bénéficier de revenus par ruissellement. Ce qui arrive aux Massai dans le Ngorongoro est pour moi un scandale. Déporter des personnes génantes pour accueillir des touristes friqués voire des émirs omnipotents est une atteinte aux droits de l'homme. Il faut savoir que beaucoup de choses sont du domaine du folklore comme des camps Hadza ou Massai reconstitués à proximité des grands parcs pour là encore faire croire aux occidentaux qu'ils ont pénétré dans la vraie vie des habitants du pays. En fait, dans ces camps reconstitués comme le Massai Mara qui en est l'étendard, tout est bidon. C'est comme si on invitait des américains au Puy du Fou ou au rocher Mistral en leur faisant croire que c'est comme ça que les français vivent. Finalement, les relations entre Africains et Occidentaux reste du domaine du phantasme : les Africains nous imaginent richissimes, à la vie facile, plein de produits de consommation, l'El dorado dont il rêve et qui leur font quitter leur pays pour vivre ce rêve qui se transforme en cauchemar une fois arrivés sur place ; nous imaginons une Afrique sauvage, authentique, traditionnelle, tribale alors que les sociétés africaines se modernisent à la vitesse de la lumière avec un dynamisme incroyable. Par exemple, Kwermusl, le village où nous avons enregistré les Iraqw en 2020 s'est électrifié depuis. La jeunesse de l'Afrique apporte un sang neuf et une énergie qui manque à nos sociétés occidentales dont les préoccupations tournent sur le financement des retraites, la sécurité et le maintien d'un pouvoir d'achat.Ironiquement, le parc de Manyara que nous avons visité en 2020 est complètement inondé en 2022, le rendant difficilement visitable. Ces quelques photos prises depuis notre 4x4 ouvert restent incroyables, avec notamment un coup de flip quand un éléphant se rapprochera si près du véhicule que Boniface hurlera "tend, tenda, tenda, tenda" au chauffeur pour s'éloigner.